Homélies du Père Jacques Pineault

C 30 LUC 18, 09-14

Chimay : 23.10.2022

Frères et sœurs, en ce dimanche des missions, le pape François nous rappelle le rôle missionnaire de l’Église. Nous, chrétiens, nous sommes tous des missionnaires, chacun à notre façon. Notre pensée et notre prière vont spontanément pour ces prêtres, religieux et laïcs qui ont quitté leur famille et leur pays pour porter l’Évangile sur d’autres continents, souvent au péril de leur vie. Et nous n’oublions pas ceux qui viennent chez nous pour nous évangéliser. Notre mission à tous, c’est d’annoncer la bonne nouvelle de la miséricorde de Dieu. L’harmonie universelle dépend désormais de nous, mais tout se passe selon le désir de Dieu. Et pour mieux répondre à cette mission qui est la nôtre, nous nous mettons à l’écoute de la Parole de Dieu.

Le livre de Ben Sira le Sage (35,15-22) nous invite à rectifier l’image que nous nous faisons de Dieu. « Dis-moi quelles sont tes images de Dieu et je te dirai quel Dieu tu fréquentes ». Dans le secret de notre cœur, quel Dieu voyons-nous spontanément ? Un juge imbu de sa puissance ? Un comptable impitoyable ? Un policier, un œil de Caïn, à qui rien n’échappe ? Ou mon Dieu serait-il celui de Jésus-Christ, c’est-à-dire un Dieu qui se fait tout proche, tout petit, tout humble ? Un Dieu qui emprunte le visage d’un enfant, d’un ami, d’un collègue ou d’un parent pour me porter secours ou me dire qu’il m’aime ? Un Dieu à l’écoute de qui je suis et qui m’accompagne sur le chemin de la vie peu importe le parcours tordu que j’emprunte ?

C 29 LUC 18, 01-08  (20) Chimay :

16.10.2022

Frères et sœurs, la Parole de Dieu de ce dimanche nous invite à nous interroger sur la place que nous donnons à la prière dans notre vie. Le livre de l’Exode nous montre la vaillante supplication de Moïse. C’est grâce à cette prière que le peuple a pu triompher dans sa lutte contre ses ennemis amalécites. Si Dieu est tout-puissant, l’homme participe cependant à son œuvre par la prière. En lisant ce récit, nous comprenons l’importance et la force de la persévérance dans la prière personnelle et communautaire.

Dans sa marche vers la terre promise, le peuple de Dieu doit à la prière persévérante de Moïse de triompher des obstacles qu’il rencontre. C’est le type de la guerre sainte : notre cause est juste, Dieu est avec nous et nous vaincrons. Cette conception peut choquer notre mentalité moderne. Peut-être est-il bon cependant de voir comment Dieu a fait patiemment l’éducation religieuse de l’humanité qu’il a prise là où elle en était ? Il nous est trop facile de juger les siècles passés avec l’acquis actuel de la Révélation. En tout cas, Moïse et l’enfant que nous étions avaient peut-être plus de foi en la prière que nous autres une fois adultes.

Nous lisons la Bible parce que « tous les passages de l’Ecriture sont inspirés par Dieu » (2 Tm 3,16), nous dit saint Paul. Tantôt Dieu nous y enseigne le mystère de son être et son projet sur l’homme ; tantôt il conteste les conceptions trop sécurisantes qui minent la vie des hommes ; tantôt il redresse notre tendance à idolâtrer tout ce qui nous séduit ; tantôt il éduque l’homme et le fils qu’il veut réussir en nous. Et si la Parole de Dieu nous prend parfois à contrepied, remercions celui qui a le courage de nous l’annoncer.

Quand nous lisons les textes sacrés, c’est Dieu qui nous parle. Il ne demande qu’à nous communiquer la sagesse « en vue du salut par la foi que nous avons en Jésus Christ » (2 Tm 3,15). Ce trésor de l’Évangile est fait pour être partagé largement et avec persévérance. Mais pour l’apôtre Paul, tout commence dans la prière. Pour lui, c’est une manière de vraiment mettre le Christ au centre de sa vie et de sa mission. C’est ainsi qu’il a pu dire : « Ce n’est plus moi qui vis, c’est le Christ qui vit en moi » (Ga 2,20).

Nous, chrétiens baptisés et confirmés, nous sommes tous envoyés. Comme Moïse et Paul, nous sommes tous invités à nous mettre en prière pour soutenir tous ceux qui annoncent l’Évangile sur les cinq continents. Beaucoup y sont affrontés à la persécution et aux violences de toutes sortes. Ils comptent sur nous pour les soutenir de notre prière personnelle et communautaire. Croire en la prière d’intercession, c’est ne pas baisser les bras.

Dans l’Évangile de ce jour, Jésus dit à ses disciples « une parabole sur la nécessité pour eux de toujours prier sans se décourager » (Lc 18,1) : c’est l’histoire d’une pauvre veuve complètement démunie. Elle a des démêlés avec la justice ; mais le juge qu’elle va rencontrer reste sourd à sa demande. Nous connaissons cela : quand l’administration ne veut rien entendre, c’est vraiment difficile d’obtenir gain de cause. Mais la parabole de l’Évangile nous montre que tout finit bien. À force d’être harcelé, le juge a répondu à la demande de cette veuve car il n’en pouvait plus d’entendre ses supplications répétées. Sa prière révèle son attitude intérieure : la persévérance, la constance, la confiance.

Si Jésus nous raconte cette parabole, c’est pour nous parler de Dieu : dans notre monde, un mauvais juge arrive à faire droit à une plaignante ; à plus forte raison, Dieu qui est Père ne peut que rester attentif à toutes nos demandes. Il nous écoute toujours avec bienveillance, quoi que nous lui demandions. Notre Dieu n’est pas ce juge dont nous parle l’Évangile ; il est notre Père, un Père prodigue, qui aime chacun de ses enfants et qui ne veut que leur bonheur. Voilà une bonne nouvelle qui devrait nous combler de joie.

Si la réclamation persistante de la veuve a le don d’exaspérer ce juge, combien plus une prière persévérante aura-t-elle d’effet sur Dieu, qui veut nous combler ! Mais pour quoi prie-t-on ? Pour changer Dieu, ou pour que la prière nous aide à entrer dans son dessein sur nous et sur les autres, lequel n’est pas toujours dans la ligne de notre volonté ou supposée clairvoyance ? La perte du sens de la prière n’est-elle pas le signe d’une diminution de la foi ?

Et pourtant, beaucoup disent qu’ils prient, mais ils ont l’impression de ne pas être exaucés. Alors, ils finissent par se décourager. Le problème ne vient pas de Dieu mais de nous ; le Seigneur est toujours là, à l’écoute, mais trop souvent, il n’y a personne pour l’écouter ; nous ne pensons qu’à notre demande et nous n’obtenons pas la réponse que nous attendons. Nous oublions alors que nous avons été entendus bien au-delà de tout ce que nous pouvons imaginer. L’important, c’est de toujours rester en dialogue avec Dieu et de ne pas demeurer centrés sur nos pauvres demandes. C’est ainsi que nous serons de plus en plus reliés à ce Dieu qui est Amour. Saint Paul nous le dit à sa manière : « Rien ne peut nous séparer de l’amour de Dieu » (Rm 8,38).

La parabole de cet évangile se termine par une question posée à tous : « Le Fils de l’Homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ? » (Lc 18,8). Le pire ennemi de la foi c’est le découragement, c’est quand on devient blasé, quand on ne voit que ce qui va mal. Le Seigneur nous met en garde contre ce danger. Croire, c’est s’obstiner dans la prière, c’est crier vers Dieu jour et nuit, sans baisser les bras. Il ne manquera pas d’oiseaux de malheur pour dire que ça ne sert à rien. Mais l’exemple de la veuve est là pour nous apprendre l’obstination. Saint Paul recommande à ses disciples de méditer l’Ecriture pour obtenir la sagesse, de laquelle doit découler le salut.

Une femme préparant son doctorat en théologie me demandait un jour : « Quoi faire pour devenir un être spirituel ? Mes études ne m’y conduisent pas ». Ma réponse : « Méditer la Parole de Dieu, prier et fréquenter les sacrements ». – « Rien que ça ! » – « Le faites-vous ? » C’est pourtant simple et à la portée de tout le monde.

Jésus écoute avec intérêt ceux qui viennent à lui, il défend leurs droits, qu’ils soient aveugles, paralysés, possédés, rejetés, désespérés, qu’ils soient nés hier ou aujourd’hui. La prière est l’une des clefs de la vie spirituelle. Moïse n’est qu’un homme, sujet à la faiblesse. Il laisse retomber ses bras, et ses mains s’alourdissent. On peut voir là une image des difficultés qui guettent tout homme de prière. Mais l’aide des autres lui permet de tenir bon, et sa prière porte son fruit. Ce que pointe la parabole de la veuve, c’est justement la persévérance, l’invincible espérance, l’inlassable prière, qui coule des lèvres du croyant comme un fleuve de vie, tout comme la prière infinie de la Vierge Marie, notre modèle à tous.

C 25 LUC 16, 01-13  (12)

Chimay : 18.09.2022

Aujourd’hui, frères et sœurs, Jésus nous invite à réfléchir sérieusement sur l’utilisation que nous faisons de l’argent et des biens de ce monde. Car « l’amour de l’argent est la racine de toutes sortes de maux » (1 Tm 6,10). Pour nous aider à mieux comprendre son message, Jésus nous raconte la parabole du gérant corrompu : ce dernier va être licencié pour faute grave – il dilapide les biens de son maître et va se retrouver à la rue, les poches vides. Il réfléchit très vite à la meilleure solution pour s’offrir une porte de sortie après son renvoi : travailler la terre ? Pas possible ! Mendier ? Ce serait la honte. Il pense plutôt à s’attirer la bienveillance des débiteurs de son maître en abaissant leurs dettes. C’est de cette manière qu’il choisit d’assurer son avenir.

C 27 LUC 17, 05-10 (14)

02.10.2022 : Chimay

Frères et sœurs, la prière d’Habacuc commence par un cri de révolte : « Combien de temps, Seigneur, vais-je appeler, sans que tu entendes ? » Ce cri de souffrance était celui du prophète. Nous l’avons entendu s’adresser à Dieu : « Pourquoi me fais-tu voir le mal et regarder la misère ? Devant moi, pillage et violence ; dispute et discorde se déchaînent » (Ha 1,2-3). (Le royaume de Juda est en butte à la convoitise de ses voisins, qu’il s’agisse de l’Egypte ou de Babylone). Ce cri du prophète est bien souvent le nôtre. Tous les jours, les médias nous rappellent à quel point ce mal et cette violence sont bien présents dans notre monde. Comme le prophète, nous crions vers le Seigneur : « Combien de temps ? Pourquoi ? Pourquoi Dieu reste-t-il silencieux devant la violence, le harcèlement, les prises d’otage et le mépris ? » Mais Habacuc, loin de perdre la foi, s’obstine dans la prière malgré le silence de Dieu. Et Dieu répond : « Le juste vivra par sa fidélité » (Ha 1,4).

Devant la violence qui nous entoure, la vision d’un monde réconcilié tarde à se réaliser. Pourtant, elle viendra, certainement, et ne décevra pas le juste qui vit par sa fidélité. Notre réponse, c’est celle de la foi. Bien souvent, nous avons l’impression que le salut promis paraît tarder. Il faut toute l’énergie de l’espérance pour le croire possible. C’est pour cette raison que l’apôtre Paul recommande à Timothée (2 Tm 1,6-14) et à chacun de nous de réveiller le don de Dieu ; il veut nous aider à vaincre la peur pour témoigner avec courage de l’espérance qui nous anime. « Dieu ne nous a pas donné un esprit de peur, mais un esprit de force, d’amour et de pondération pour annoncer l’Évangile ». Nous ne devons pas craindre de rendre témoignage à notre Seigneur. L’Évangile du Christ doit être reçu et proclamé dans le monde entier de génération en génération. « Garde le dépôt de la foi (i.e. l’Évangile) dans toute sa beauté, avec l’aide de l’Esprit Saint qui habite en nous » (2 Tm 1,14).

La suite de la prière d’Habacuc nous montre que le mal et la violence ne viennent pas de Dieu. Bien au contraire, le Seigneur ne cherche qu’à nous en libérer et nous sauver. Il devient donc urgent que chacun se mette dans une attitude d’accueil et de prière : « Aujourd’hui, ne fermons pas notre cœur, mais écoutons la voix du Seigneur ». Le psaume 94 que nous avons prié nous invite précisément à venir, à entrer, à écouter. Notre Dieu reste fidèle à son alliance ; il est notre rocher, notre salut. Nous sommes son bien le plus précieux.

C 25 LUC 16, 01-13  (12)

Chimay : 18.09.2022

Aujourd’hui, frères et sœurs, Jésus nous invite à réfléchir sérieusement sur l’utilisation que nous faisons de l’argent et des biens de ce monde. Car « l’amour de l’argent est la racine de toutes sortes de maux » (1 Tm 6,10). Pour nous aider à mieux comprendre son message, Jésus nous raconte la parabole du gérant corrompu : ce dernier va être licencié pour faute grave – il dilapide les biens de son maître et va se retrouver à la rue, les poches vides. Il réfléchit très vite à la meilleure solution pour s’offrir une porte de sortie après son renvoi : travailler la terre ? Pas possible ! Mendier ? Ce serait la honte. Il pense plutôt à s’attirer la bienveillance des débiteurs de son maître en abaissant leurs dettes. C’est de cette manière qu’il choisit d’assurer son avenir.

C 26 LUC 16, 19-31 (15)

Chimay : 25.09.2022

Frères et sœurs, la liturgie de ce dimanche nous fait entendre la voix du prophète Amos (6,1-7). Le prophète c’est quelqu’un qui parle de la part de Dieu. Sa mission n’est pas d’enfoncer le pécheur dans son mal mais de l’appeler à se convertir. Aussi il dénonce le luxe insolent des classes dirigeantes du pays, aveugles sur la misère du peuple. Il se montre implacable envers la société corrompue de son temps. Quand le droit et la justice sont bafoués, le pays court à sa perte. Dieu ne supporte pas, dit-il, qu’une petite minorité s’enrichisse au détriment des plus pauvres. Si Amos revenait, il dénoncerait tout ce gaspillage en biens essentiels qui est une gifle à tous ceux et celles qui n’ont pas de quoi survivre. Dans son encyclique « Laudato si », le pape François nous invite tous à une telle conversion.

C 24 LUC 15,01-32 (17)

Chimay : 11.09.2022

Frères et sœurs, dans le livre de l’Exode, nous trouvons l’histoire du veau d’or (Ex 32,7-14). Pendant que Moïse était en présence de Dieu sur le mont Sinaï, les Hébreux se sont fabriqué un dieu en forme de veau d’or, puis ils se sont prosternés devant lui. Nous pouvons nous donner bonne conscience en nous disant que ce comportement est dépassé. Mais en fait, il est toujours d’actualité : on ne se prosterne plus devant le veau d’or mais devant l’argent, les dieux du stade, les vedettes, le pouvoir politique ; et nous voyons bien que la course effrénée qu’ils engendrent est la cause de nombreux malheurs.