Homélies de Dom Armand Veilleux

7 janvier 2024 – Épiphanie du Seigneur

Is 60,1-6 ; Ép 3,2-3a.5-6 ; Mt 2,1-12

Homélie 

          L’Évangile de Matthieu est d’une extrême sobriété au sujet de la naissance de Jésus. Dans son premier chapitre, il trace tout d’abord l’arbre généalogique de Joseph et donc aussi de Marie, puisqu’ils appartenaient évidemment à la même tribu et à la même famille élargie. Puis vient le récit de l’apparition de l’ange Gabriel à Joseph lui disant de ne pas hésiter à prendre Marie pour épouse. Ensuite, dès le chapitre suivant, le deuxième, Jésus est « découvert » par les Mages venus d’Orient, qui lui offrent des présents royaux avant de retourner chez eux. De ces personnages, l’Évangile ne dit rien d’autre ; aussi, la piété populaire n’a cessé au cours des siècles de broder et d’ajouter des détails à leur sujet.

2 janvier 2024– Mémoire de Saint Basile le Grand et de Saint Grégoire de Nazianze

1 Jn 2, 22-28 ; Jn 1, 19-28

Homélie

            L’Évangile d’hier (1 janvier) nous présentait Marie, la contemplative, qui gardait dans son cœur et méditait tout ce qu’elle entendait au sujet de son fils. Dans la première lecture d’aujourd’hui Jean, un autre grand contemplatif, nous invite à faire de même : « Pour vous, que ce que vous avez entendu dès le début demeure en vous. Si en vous demeure ce que vous avez entendu dès le début, vous aussi, vous demeurerez dans le Fils et dans le Père. » Maintenant que nous approchons déjà de la fin du « Temps de Noël », nous devons voir à ce que toutes ces belles célébrations ne soient pas simplement des moments joyeux dont la mémoire s’estompe graduellement, mais qu’elles produisent en nous des fruits qui demeurent. Et Jean de nous inviter à demeurer en Dieu, puisque son « Onction » demeure en nous.

30 décembre 2023 - 6ème jour dans l’Octave de Noël

1 Jn 2, 12-17 ; Lc 2, 36-40

H o m é l i e

          La religion d'Israël était tout entière centrée sur le culte rituel et sur le Temple d'Israël, lieu privilégié de ce culte. En même temps les prophètes appelaient à la conversion du cœur, à la justice et à l'amour. Les tensions n'avaient jamais manqué entre les responsables du culte et de ses lois d'une part et les prophètes d'autre part. Quand Jésus apparaît, les prêtres et les docteurs de la loi s'imposent au peuple mais il n'y a plus de prophètes. Tout l'enseignement de Jésus consistera à montrer que ce que son Père attend des hommes, ce n'est pas d'abord une observance cultuelle ou rituelle, mais bien la pratique de l'amour, de la justice et de la miséricorde, à l'image de l'attitude de son Père à notre égard.

1 janvier 2023

Solennité de Marie, Mère de Dieu

Nb 6, 22-27 ; Ga 4, 4-7 ; Lc 2, 16-21

H o m é l i e 

          Dans l’Évangile que nous venons de lire, lorsque les bergers arrivent à Bethléem, ils découvrent « Marie et Joseph, avec le nouveau-né couché dans la mangeoire ». Marie est mentionnée la première, dans sa dignité de Mère. C’est pourquoi on fête aujourd’hui la solennité de Marie, Mère de Dieu. Au cours des siècles les Chrétiens ont attribué beaucoup de titres à Marie, avec des degrés assez différents de sobriété et de profondeur. Le titre de Mère de Dieu, qu’on lui donne depuis le Concile d’Éphèse, au quatrième siècle, est l’un des plus anciens. Cependant, dans l’Évangile, elle est tout simplement appelée la « Mère de Jésus » et même, dans l’Évangile d’aujourd’hui, la mère d’un petit enfant qui n’a pas encore de nom, puisque c’est seulement huit jours plus tard qu’on lui donnera le nom de Jésus.

28 décembre 2023 – Fête des Saints Innocents

1 Jean 1, 5 - 2, 2 ; Matthieu 2, 13-18 

H o m é l i e

          L`Évangile de Matthieu, d’où est tiré le récit évangélique de la messe d’aujourd’hui, commence par les mots : « Livre des origines de Jésus-Christ, fils de David ». Dans le texte original grec le mot traduit par « origines » dans nos bibles en langue française est « genesis » (« Biblios genesis Jesou Christou ») . Matthieu veut souligner par là le fait que la naissance de Jésus est une nouvelle genèse, un nouveau commencement, pour toute l’humanité.

31 décembre 2023 - Fête de la Sainte Famille « B »

Gn 15,1-6;21,1-3; Hé 11,8.11-12.17-19; Lc 2,22-40

 

Homélie

          En ce dimanche de la Sainte Famille, les Évangiles choisis pour chacune des trois années du cycle liturgique ne nous présentent pas une doctrine mais trois évènements vécus par la Sainte Famille. Le récit de l’an dernier (année A) était celui de la fuite en Égypte. Pour les deux autres années (années B et C), nous lisons deux récits de Luc racontant une montée de Jésus à Jérusalem avec ses parents – la présentation de Jésus au Temple par ses parents dans un cas, le pèlerinage de Jésus à Jérusalem avec ses parents, lorsqu’il avait douze ans, dans l’autre cas.

27 décembre 2023 – Fête de saint Jean

1 Jean 1, 1-4 ; Jean 20,2-8  

H o m é l i e

C’est à la joie que nous invite saint Jean dans sa première lettre, dont nous avons lu le début comme première lecture.

          Si nous voulions faire de l’exégèse pointue, nous pourrions nous demander si l’auteur de cette lettre, ou de l’apocalypse ou même de l’Évangile de Jean est vraiment l’apôtre Jean, le disciple bien-aimé qui reposa sur la poitrine de Jésus à la dernière Cène et qui se trouva, fidèle, avec Marie, au pied de la croix. Cela n’a pas d’importance en réalité, car ce que tous ces écrits nous transmettent c’est la foi des Églises d’Asie évangélisées par l’apôtre Jean. Que les textes, dans leur forme définitive aient été écrits par lui ou par ses disciples, cela n’a guère d’importance. Ils transmettent son message.

          L’un des aspects les plus frappants de l’Église primitive, c’est la grande diversité que l’on peut constater entre les Églises locales, ayant chacune une identité propre et une sensibilité religieuse distincte. Il y a même une grande différence entre les Églises de Palestine, de Syrie et d’Asie, d’une part, toutes sous l’influence de la pensée johannique et, d’autre part, tous les pays – disons, en gros, de l’Empire Romain – sous l’influence de Paul. Il est bon que, tout de suite après avoir célébré la naissance du Messie, ce soit le message des Églises d’Asie que nous entendions en cette fête de saint Jean.

          Dans les deux textes que nous avons entendus, nous percevons un aspect important de la prédication chrétienne primitive, qui n’est pas un enseignement sur les vérités de la foi, ni même – pourrait-on dire – un enseignement sur le Christ, mais tout simplement la transmission d’une expérience. Et cela est tout à fait dans la ligne de la prédication de Jésus lui-même. Jésus n’a pas fait de grandes leçons de théologie morale ni même de théologie dogmatique. Il nous a dit simplement qu’il avait un Père ; et il s’est efforcé de nous faire comprendre à travers plusieurs paraboles, qui était son Père, puis il nous a dit que son Père et lui étaient unis dans un lien d’amour qu’il a appelé l’Esprit Saint, et il nous a dit que nous étions invités à entrer dans ce même réseau d’amour et à devenir nous aussi un avec Lui, son Père et l’Esprit Saint.

          Jean, dans l’Évangile d’aujourd’hui ne fait rien d’autre. Il veut tout simplement nous transmettre non pas des idées ni des exhortations moralisantes, mais simplement son expérience : « ce que nous avons entendu, ce que nous avons vu de nos yeux, ce que nos mains ont touché du Verbe de vie ». Et il nous dit tout bonnement qu’il le fait pour que SA joie soit complète. Ce qui nous fait comprendre que notre joie à nous aussi sera complète lorsque nous partagerons avec nos frères et nos soeurs, et, à travers notre vie, avec le monde entier, notre propre expérience du Christ.

          Pour l’Évangile que nous avons entendu, c’est aussi la dernière phrase, qui retient notre attention : « Il vit et il crut ». C’est lapidaire. Ce qu’il vit, c’étaient des choses qui pouvaient être décrites : des bandelettes et un morceau de linge qui avait recouvert la face de Jésus. Ce qu’il crut ne peut être décrit.   Il crut tout simplement. C’est à dire que sa confiance et son amour pour le Christ retrouvèrent toute leur intensité.

          Nous sommes facilement préoccupés de la joie des autres ; mais nous ne pouvons communiquer que celle que nous avons. Alors, comme l’apôtre Jean, partageons tout simplement à travers notre vie notre propre expérience de l’Enfant de Bethléem : ce que de Lui nous avons vu, entendu, touché dans nos vies. Et faisons-le tout simplement – je dirais presque égoïstement – pour que notre joie soit complète. Et si notre joie est vraie, elle sera contagieuse !

Armand Veilleux