C PÂQUES 03 JEAN 21,01-19 (14)

Chimay : 01.05.2022

         Frères et sœurs, l’Évangile de ce dimanche nous rapporte la troisième apparition de Jésus ressuscité à ses disciples. Cet événement a lieu sur les rives du lac de Galilée. Tout commence par une décision de Simon Pierre d’aller à la pêche. Lui et ses compagnons étaient désœuvrés depuis une dizaine de jours.  Que faire quand on n’a plus rien à faire : aller à la pêche ? Une pêche qui s’est d’ailleurs avérée infructueuse. C’est là, dans cette situation d’échec et d’ennui que Jésus rejoint ses disciples. Il se présente à eux sur les rives du lac, mais ils ne le reconnaissent pas. Personne ne s’imagine que Jésus est revenu des morts. C’est d’ailleurs dans des situations semblables que personne ne pense que Dieu nous accompagne, n’est-il pas vrai ?

S’adressant à ces pêcheurs fatigués et déçus, Jésus leur fait recommencer leur pêche : « Jetez le filet à droite de la barque, et vous trouverez » (Jn 21,6). Et là, le résultat dépasse toutes leurs espérances. L’Évangile nous parle de 153 poissons. Ce chiffre symbolique correspond au nombre d’espèces de poissons connues à l’époque. C’est une manière de rappeler la mission universelle à ceux qui seront appelés à devenir pêcheurs d’hommes. Mais il ne faut pas oublier que cette pêche extraordinaire n’a été possible qu’avec le Seigneur. Ils ont jeté les filets mais c’est lui qui les a remplis. C’est vrai pour tout travail missionnaire : nous sommes envoyés pour annoncer l’Évangile, mais c’est lui qui agit dans le cœur de ceux et celles qui l’entendent.

Tout cela nous demande un amour sans faille à l’égard de Celui qui nous a appelés et envoyés. C’est ce qui est demandé à Pierre : « Simon, fils de Jean, m’aimes-tu vraiment, plus que ceux-ci ? » (Jn 21,15). Cette question revient trois fois. Nous nous rappelons que Pierre avait renié son Maître trois fois de suite. Il se trouvait donc dans une situation très inconfortable. Mais Jésus va lui offrir de s’en sortir. Pierre va pouvoir lui dire trois fois son amour. Alors Jésus fera de lui le berger de son troupeau. Tous les grands témoins de la foi sont des pécheurs pardonnés, des gens qui ont accueilli la miséricorde de Dieu.

La miséricorde du Christ ne connaît pas de limite. C’est vrai pour chacun de nous. Il nous rejoint tous là où nous en sommes pour raviver notre espérance. Pour lui, il n’y a pas de situation désespérée. Comme Pierre, nous sommes invités à plonger et à lui faire confiance sur parole. Pierre se jette à l’eau, symbole du baptême, pour aller à la rencontre du Ressuscité. C’est toujours la mission des responsables de l’Église de prendre des risques par amour du Christ et de leurs frères. Comme lui, nous sommes envoyés dans ce monde pour témoigner de l’espérance qui anime les baptisés. C’est à tous et à chacun que le Christ ressuscité veut manifester sa miséricorde. Lui-même nous dit qu’il est venu « chercher et sauver ceux qui étaient perdus » (Lc 19,10). Il veut nous associer tous à sa victoire sur la mort et le péché.

Le livre des Actes (5,27-41) nous montre les apôtres en train de remplir cette mission que le Christ leur a confiée. Ils ont reçu deux fois l’interdiction de parler au nom de Jésus. Trainés devant le même tribunal qui a condamné Jésus, les apôtres maintiennent qu’ils sont, eux et l’Esprit Saint, les témoins de la résurrection de Jésus, malgré les lourdes menaces qui pèsent sur eux. Ils choisissent d’obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes (Ac 5,29). C’est l’Esprit Saint qui a fait de ces hommes peureux des missionnaires courageux, « dignes de subir des humiliations pour le nom de Jésus » (Ac 5,41). Comme eux, nous ne pouvons pas taire la foi qui nous habite.

L’Apocalypse de Saint Jean est un livre un peu déroutant quand on n’en a pas l’habitude ; aujourd’hui, nous avons entendu des paroles de victoire, de triomphe et de louange (Ap 5,11-14). Il faut savoir que tout cela a été écrit dans un langage codé pour encourager les chrétiens persécutés à rester fermes dans la foi. Il les encourage à rendre gloire à l’Agneau immolé vainqueur de la mort et du péché. Aujourd’hui encore, de nombreux chrétiens sont affrontés à la persécution ou tournés en dérision. Mais la puissance de l’amour est une force contagieuse que rien ni personne ne peut arrêter. En définitive, c’est l’amour et non le mal qui aura le dernier mot.

Le grand message de la Parole de Dieu aujourd’hui est que le Christ ressuscité est toujours là, même si nous ne le voyons pas. Il ne cesse de nous rejoindre au cœur de nos vies, de nos doutes et de nos épreuves. Il vient nous pardonner et nous encourager. Avec lui, nous pouvons nous relever et renaître à la confiance. La nourriture qu’il nous propose pour refaire nos forces, ce n’est plus du poisson grillé, mais son Corps et son Sang. Comme Pierre, nous sommes confirmés dans l’amour. Nous sommes envoyés pour être ses témoins et ses messagers.

Aujourd’hui, l’Église grandit. En plus des cinq apôtres, le Christ ressuscité apparaît à « deux autres disciples » (Jn 21,2). Elle rassemble des gens ordinaires. Pierre est pressé non pas d’annoncer l’Évangile mais de retrouver ses filets. L’Église est voulue par Dieu, mais elle se heurte au manque d’intérêt des hommes. Sa mission est universelle, pourtant, la tâche peut s’avérer délicate pour les disciples : « Ils passèrent la nuit sans rien prendre » (Jn 21,3). Heureusement, un mystérieux inconnu les guide depuis le rivage : « Essayez à droite ! » (Jn 21,6).

Devant la quantité de poissons, Jean reconnaît la générosité du Maître. Il est le premier à proclamer la présence de Jésus. Pierre se jette à l’eau pour le rejoindre. Lui seul peut le laver de sa faute. Jésus ne lui fera aucun reproche. Il ne lui demande que son amour. Comme il est difficile de s’entendre parler d’amour lorsqu’on a trahi ! Avant de lui confier l’Église, Jésus voulait sans doute que Pierre se sache pardonné.

L’apparition de Jésus à ses disciples fonde notre foi et notre espérance. Elle nous rappelle la grâce de la charité que Dieu nous fait particulièrement aujourd’hui quand nous nous rassemblons pour célébrer le Christ ressuscité le dimanche. Pour comprendre l’ampleur de cette grâce vécue dans la joie du mystère pascal, tous les détails de cet évangile comptent. Entre autres : 1. Le chiffre sept est le chiffre de la perfection. Les sept disciples retournent à leur quotidien en allant à la pêche. C’est bien dans l’ordinaire de nos jours, notre pain quotidien, que le Seigneur se révèle. 2. Nathanaël de Cana en Galilée était présent aux noces de Cana (Jn 2,11), il est là présent au repas que Jésus prépare sur le rivage. Tout disciple est désormais heureux d’être invité « au repas des noces de l’Agneau ». 3. Aujourd’hui encore Jésus se tient sur nos rivages, il nous demande de la nourriture, celle de nos vies ; il nous appelle à écouter sa parole, à reconnaître les fruits de sa grâce et à répondre avec foi : « C’est le Seigneur ! » (Jn 21,7). 4. Comme Pierre, nous sommes appelés à plonger sans cesse dans la grâce de notre baptême, pour rejoindre le Seigneur. 5. « Jésus s’approche ; il prend le pain et le leur donne ; et de même pour le poisson » (Jn 21,13), Jésus est bien celui qui s’est fait pain de notre vie. Nous sommes invités à reconnaître Jésus ressuscité dans le pain partagé, à en témoigner et à lui rendre grâce.

Mai est le mois de Marie. Ce que nous remarquons chez elle, c’est sa hâte quand elle se rend chez sa cousine Élisabeth. Elle part aussitôt et en toute hâte (Lc 1,39). Dans la Bible, il y a un mot qui revient souvent, c’est « aussitôt ». La bonne nouvelle c’est que Marie n’a pas changé. Nous pouvons l’appeler et « aussitôt » elle accourt vers nous avec Jésus en elle ou près d’elle. C’est avec Jésus et Marie que nous pourrons être « disciples et missionnaires », en fait véritables chrétiens.