15 juin 2025 - Dimanche de la Trinité
Prov 8, 22-31 ; Rom 5, 1-5 ; Jean 16,12-15
H O M I L I E
L'Écriture décrit la création comme l'œuvre d'un Dieu joueur. Dans le livre des Proverbes, nous avons entendu la Sagesse de Dieu dire : « Quand il a affermi les cieux, quand il a établi les fondations de la terre... j'étais à ses côtés... et j'étais chaque jour ses délices, jouant devant Lui tout le temps, jouant sur la surface de sa terre ; et j'ai trouvé mon plaisir dans les êtres humains ».
Le livre de la Genèse montre Dieu jouant dans le sable, ou dans l'argile, au matin de la création, et finissant par former dans ses mains une forme qui lui plaisait tant qu'il insuffla dans ses narines son propre souffle de vie, et elle devint un être vivant. Paul décrit la même réalité lorsqu'il dit, dans un langage plus théologique, que « l'amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par le Saint-Esprit qui nous a été donné ».
Nous avons été créés à l'image de Dieu, à partir du souffle même de Dieu, portant dans nos cœurs une graine de vie divine qui est toujours appelée à grandir. Nous pouvons donc dire que nous avons été créés avec une capacité infinie de croissance.
Jésus de Nazareth est l'être humain en qui cette capacité de croissance a atteint son plein épanouissement : tellement humain (tel que Dieu voulait que les êtres humains soient), tellement à l'image de Dieu, qu'Il est cette image, qu'Il est Dieu. Parfaitement Dieu et parfaitement humain. Il a vécu à la manière humaine tout ce qu'est Dieu. Il nous a manifesté la richesse de la relation, la capacité d'amour et d'engagement qu'est Dieu.
Il a partagé cette expérience avec nous : il nous a parlé de sa propre relation avec Dieu. Il a parlé de Dieu comme de son Père. Il a dit que son Père et lui étaient un, qu'ils étaient liés par un mystère d'amour qu'il appelait l'Esprit. Il a aussi parlé de Dieu comme d'une mère tendre ; il a parlé de lui-même comme de l'époux, comme du berger. À travers d'innombrables symboles et images, il nous a donné un aperçu de la très riche vie affective de Dieu. Il est important de se rappeler que Dieu est infiniment plus grand et merveilleusement plus beau que tous ces symboles, qui ne sont que des fenêtres nous permettant d'entrevoir le mystère.
Jean, le disciple le plus proche du cœur de Jésus, a résumé tout cet enseignement en disant que « Dieu est amour ». Plus tard, un mot a été inventé pour décrire cette danse de la vie et de l'amour au sein de Dieu. Nous l'avons appelée Trinité. Puis les Pères de l'Église et les théologiens ont élaboré divers systèmes théologiques en utilisant les catégories de personne, nature, relation, etc., inventant un langage de plus en plus compliqué, utilisant des mots comme "circumincession", et autres. Puis ils se sont disputés à propos de ces mots et ont développé diverses hérésies aux noms encore plus exotiques. En fin de compte, tous ces systèmes et ces profondes réflexions théologiques ne disent rien de plus que ce que Jean a dit en trois mots : Dieu est amour.
Pour nous, le plus merveilleux est que nous sommes appelés à nous joindre à cette danse, à entrer dans cette relation, à nous unir à la Sagesse divine « qui joue devant Dieu à la surface de la terre et trouve sa joie dans les fils et les filles de Dieu ». Si Dieu est amour, chaque fois que nous aimons authentiquement, nous participons à la nature et à la vie de Dieu. Que ce soit l'amour entre parents et enfants, entre époux, entre amis, entre frères ou sœurs dans une communauté monastique, nous participons à la vie de Dieu. Quand nous aimons les autres, et aussi quand nous nous aimons nous-mêmes (comme Dieu nous aime), nous vivons le mystère de la Trinité, de Dieu qui est à la fois aimant, aimé et amour.
À la fin de la Cène, Jésus a dit à ses disciples : « Si vous m'aimez, vous garderez mes paroles. Mon Père vous aimera, et nous viendrons habiter chez vous ». Le mystère de la vie divine est un mystère d'habitation, et nous pourrions donc dire qu'il s'agit d'un mystère monastique. Le mot utilisé dans le texte grec pour « habiter » est « monè », qui est le nom grec du monastère. Jésus dit donc : « nous viendrons et nous ferons notre monastère en vous ». L'étymologie de « monè » ou « monasterion » est le verbe « menein », qui signifie habiter. Un monastère n'est donc rien d'autre qu'un « lieu d'habitation », c'est-à-dire un lieu où nous habitons la parole de Dieu, où nous habitons ensemble, et où Dieu vient habiter avec nous. Un lieu de relation, d'amitié, d'amour. En d'autres termes, un lieu où nous ne nous contentons pas de proclamer, mais où nous vivons réellement le mystère de la Trinité : le triple mystère de Quelqu'un qui est aimant, aimé et amour. Et bien sûr, on peut en dire autant d'une famille.
Armand Veilleux