24 mai 2020 -- 7ème dimanche de Pâques "A"

Actes 1, 12-14; 1 Pierre 4,13-16; Jean 17,1-11

 

H O M É L I E

          Dans le livre des Actes des Apôtres, Luc se réjouit de ce que la prédication de la Bonne Nouvelle commence à Jérusalem.  Il y voit la réalisation des prophéties concernant la Jérusalem future et son rôle dans un univers restauré.  Cette place centrale de Jérusalem est également évidente dans son Évangile, qui s'ouvre et se clôt dans le Temple.

 

          Dans les Actes comme dans l'Évangile de Luc, l'Ascension de Jésus est décrite avec un grand renfort de symboles, dont il importe de découvrir le message spirituel.  Ce que nous avons célébré le jour de l'Ascension n'est pas un phénomène matériel, une sorte de voyage spatial de Jésus, anticipant la technologie moderne !  Jésus, après sa résurrection et son ascension n'a pas été transformé en une sorte de satellite gravitant autour de la terre, très haut dans le ciel.  C’est un mystère que nous avons célébré, une réalité spirituelle : le fait que, bien que Jésus nous ait quittés, il nous est aussi présent qu'auparavant, quoique dans un nouveau mode de présence.

          Chez l’Évangéliste Jean nous trouvons une sensibilité spirituelle différente.  Son Évangile est construit autour du thème de la glorification du Fils, et l'apothéose de tout l'Évangile se trouve dans le grand acte sacerdotal de Jésus, sa mort sur la croix.  Le texte de cet Évangile que nous venons de lire appartient au troisième discours de Jésus après la Cène, qui nous donne sa prière sacerdotale.  Sur le point de mourir, Jésus jette un regard sur le passé.  Toute sa vie se résume dans une seule chose : la glorification de son Père et la glorification progressive de l'humanité.  La raison de sa venue a été d'apporter la vie en plénitude, d'infuser la vie divine dans la texture même de l'existence quotidienne des hommes et des femmes. 

          Cette longue prière prononcée par Jésus quelques heures avant sa mort, prend un sens nouveau et particulier, lorsqu'on la lit entre l'Ascension et la Pentecôte.  Le quatrième Évangile nous amène à voir que le mystère pascal du Christ a une valeur permanente pour l'Église de tous les temps.  L'Esprit continue dans la passion de l'humanité et de l'Église le rôle qu'il a joué dans la Passion du Christ.  Il devient le "Paraclet", l'avocat, le défenseur, qui fait voir comment doit se réaliser le plan de salut de Dieu sur l'humanité.

          La lettre de Pierre, d’où est tirée la deuxième lecture que nous avons entendue, a été écrite à une époque où les Chrétiens étaient persécutés.  Pierre leur rappelle que si c’est parce qu’ils sont Chrétiens qu’ils souffrent, ils doivent s’en réjouir, et cela pour deux raisons.  Tout d’abord parce qu’ainsi ils communient aux souffrances du Christ et que, d’autre part, cela leur vaudra d’être dans la joie et l’allégresse le jour où la gloire du Christ se manifestera.  Les Actes des Martyrs de l’Église primitive nous donnent de nombreux exemples d’hommes et de femmes allant joyeusement à la mort par fidélité au Christ.  Où pouvaient-ils bien puiser leur force et leur courage ? 

         

          Ils puisaient ce courage et cette force dans leur foi au Christ, bien entendu, mais dans une foi partagée en Église.  C’est leur appartenance à une communauté de croyants qui donnait cette force à leur foi.  Et cette communauté de croyants trouvait son unité et sa cohésion dans la prière.  Le texte des Actes des Apôtres nous montre la Communauté primitive en prière avec les Apôtres et autour de Marie.  N’est-ce pas là la dimension la plus essentielle de l’Église ?

          La joie pascale est une joie réaliste.  Elle n'est pas naïf enthousiasme de printemps oublieux de l'hiver.  Souvent, durant le Temps Pascal, la Liturgie de la Parole nous rappelle les difficultés de la condition humaine -- une condition humaine qui continue, hélas, de choisir souvent la mort contre la vie ; comme si les tragédies naturelles, comme la pandémie que connait actuellement l’humanité, ne suffisaient pas.  Le drame de la guerre sans fin en Syrie, au Soudan du Sud et en tant d’autres parties du monde est là pour nous en rendre conscients.  Même durant la Pâque, le Vendredi Saint se continue.  La mort sur la croix reste toujours présente, mais comme une ouverture sur la vie, une vie qui doit être choisie, une victoire qui ne peut être achevée que dans et par l'amour.

Armand VEILLEUX