Chapitre du 4 mai 2014

Communauté de Scourmont

Réflexion sur le sacerdoce

L’ordination sacerdotale que nous avons eue hier est l’occasion de réfléchir un peu sur le sacerdoce et sa place dans la vie d’un moine.

Cependant je voudrais tout d’abord souligner comment la célébration d’hier a été une belle expression de l’insertion de notre communauté dans l’Église et la société. C’était avant tout une célébration communautaire, puisque c’est un membre de la communauté qui était ordonné pour exercer un ministère dans la communauté. Le lien avec notre Église locale était évident, puisque c’est l’évêque du diocèse où se trouve notre monastère qui ordonnait Damien.Et un bon nombre de prêtres du diocèse, reliés au monastère de diverses façons étaient aussi présents. Le lien avec l’Église universelle était souligné par la présence de prêtres et fidèles du diocèse de Soissons, où est né Damien, accompagnant sa nombreuse famille. Le lien avec l’Ordre était souligné par la présence de notre Père Immédiat et de moines et moniales d’autres monastères de notre Ordre. Il faudrait aussi mentionner la présence d’autres communautés monastiques du pays.Enfin les liens tout à fait spéciaux que maintient Scourmont avec la population locale étaient évidents dans la présence des nombreux amis de la communauté, y compris celle de plusieurs membres du personnel laïc de l’abbaye et des sociétés reliées à l’abbaye, sans oublier, bien sûr, les Laïcs cisterciens.C’était donc à la fois une fête communautaire et une célébration d’Église.

Mais je pensais surtout, ce matin, réfléchir sur le sens du sacerdoce. Et pour cela j’ai relu, hier, ce que dit le Catéchisme de l’Église universelle, qui fait une synthèse des enseignements de Vatican II sur le sujet.

On ne peut, évidemment comprendre le sacerdoce chrétien sans le relier au sacerdoce du Christ, auquel il est une participation. Dans la Nouvelle Alliance, il n’y a qu’un seul sacrifice et qu’un seul prêtre. À travers la célébration de l’Eucharistie le sacrifice du Christ n’est pas multiplié, ni même renouvelé ou répété.Il est simplement rendu présent, pour que nous puissions y communier. Le prêtre est un fidèle qui participe d’une façon particulière au sacerdoce du Christ à travers des ministères qui lui sont confiés.

Il est intéressant que le Catéchisme, dans la ligne de Vatican II, après avoir décrit le rôle sacerdotal du Christ, dit que toute l’Église est « sacerdotale » et que c’est tout d’abord l’ensemble des fidèles qui, de par leur baptême et leur confirmation, participent, chacun selon sa vocation, au sacerdoce du Christ. Au sein du Peuple de Dieu certains sont appelés à exercer un sacerdoce ministériel et sont ordonnés à cet effet. Ces deux sacerdoces – le sacerdoce universel des fidèles et le sacerdoce ministériel -- sont ordonnés l’un à l’autre. Comment ? La réponse de Vatican II (reprise dans le Catéchisme de l’Église universelle et plus récemment dans la dernière encyclique du Pape François), est que le sacerdoce ministériel est au service du sacerdoce universel. Le rôle des ministres ordonnés est de permettre à tous d’exercer leur sacerdoce universel, les uns et les autres participant à l’unique sacerdoce du Christ.

C’est une très belle vision, qui permet de comprendre aussi la place du sacerdoce dans la vie monastique.L’attitude des premiers moines, en Égypte en particulier, était de refuser le sacerdoce et de se contenter du ministère des prêtres nommés par les évêques.Assez rapidement se développa l’habitude que nous retrouvons dans la Règle de saint Benoît, de faire ordonner quelques prêtres pour les besoins du monastère. Par la suite, beaucoup plus tard, se développa une tendance à faire ordonner tous les moines puis un retour à la conception d’un monachisme laïc avec le nombre de prêtres nécessaires pour les besoins sacramentels.

L’important est de comprendre que tous les Chrétiens et donc tous les moines (et moniales !) participent au sacerdoce du Christ. Dans l’Église, ceux qui sont ordonnés prêtres ne sont pas plus chrétiens que les autres, mais ils reçoivent un ministère pour aider les autres chrétiens à vivre leur vie chrétienne et donc à exercer leur sacerdoce universel.De même, un moine qui est ordonné prêtre, n’est pas plus moine que les autres, mais il a un ministère sacramentel à remplir au service de la communauté monastique et, éventuellement, au nom de la communauté, auprès des fidèles qui viennent au monastère.

Donc, une ordination, au sein de la communauté, c’est une grâce non seulement pour la personne qui reçoit cette ordination, mais pour toute la communauté.Finalement elle nous rappelle que le sacerdoce le plus important est le sacerdoce universel de tous les Chrétiens qui participent tous au sacerdoce du Christ, puisque le sacerdoce ministériel est ordonné à ce sacerdoce universel.

C’est aussi l’occasion pour nous de prier pour les vocations dans notre Église diocésaine et dans les autres diocèses de Belgique et de France.Nous avons actuellement le spectacle autour de nous de quelques prêtres très âgés qui consacrent énormément d’énergies au service de quelques douzaines de paroisses sans curés. Demandons au Seigneur d’ouvrir le coeur de plusieurs jeunes à un appel au service de leurs frères dans le sacerdoce ministériel.

Armand VEILLEUX