Sainte Marie, Mère de Dieu

(Lc 2,16-21)

                                                                                                                      1 Janvier 2021

Frères et Sœurs, on dit parfois que pour chaque mère, son enfant est un dieu. Eh bien, aujourd’hui, il semble bien que ce soit vrai ! Marie a été reconnue par l’Eglise Mère de Dieu, Théotokos, c’est-à-dire celle qui engendre, enfante, accouche Dieu. En cette Octave de Noël, nous continuons donc de méditer le mystère de l’Incarnation du Verbe, Incarnation à la fois très concrète et en même temps si insondable. Lire l’Incarnation à la lumière de la proclamation de Marie Mère de Dieu, met en lumière la divinité du Christ, mais elle dit aussi l’œuvre du Christ en sa mère et en chacun de nous.

 

En se faisant fils de Marie, Dieu nous montre son humilité, et surtout son amour pour nous, sa condescendance dans le sens noble du terme. Il choisit de dépendre de notre humanité, de dépendre d’une femme pour prendre chair, naître, vivre et grandir. Or, reconnaître sa dépendance vis-à-vis de l’autre, et bien plus choisir consciemment de dépendre, c’est donner tout son amour, sa vie, et attendre, espérer, comme un mendiant, que l’on vous donne de l’amour, et la vie, et sa vie. C’est l’attitude de Dieu à notre égard, et, miracle de la grâce, c’est la réponse de Marie. Ainsi, en choisissant d’ « envoy(er) son Fils, né d’une femme et soumis à la loi de Moïse », comme le disait saint Paul dans la deuxième lecture (Ga 4,4), Dieu choisit cette folle dépendance vis-à-vis de l’humanité, dépendance que l’humanité elle-même lui avait refusée dans les personnes d’Adam et Eve. Ainsi Marie, Mère de Dieu, réinscrit Dieu dans le concret de notre histoire, histoire qui est celle de la Rédemption. Car notre histoire est certes une histoire de peines, de souffrances ou encore de pandémies, mais elle est, au sein même de cela, histoire de salut, de santé, de vie. Et c’est ce que nous dit celle qui a consenti à devenir Mère de Dieu, celle qui a cru que Dieu pouvait entrer et demeurer dans nos vies.

Ce Salut que la vie et le corps de Marie rend possible, est un humble salut, qui donnera à Marie d’être elle aussi « l’humble servante ». Car avant d’être le titre d’honneur que nous célébrons aujourd’hui, ce fut une vie d’humilité : celle de la solitude de l’Annonciation ; celle de la vie cachée à Nazareth ; celle d’un Fils qui ne se reconnaît comme mère que celle qui écoute la parole de Dieu et la met en pratique ; et enfin celle de la mère d’un condamné, d’un crucifié.

Marie est l’humble Mère de Dieu car, dès la conception de son fils, elle ne fait que recevoir, accueillir. C’est le Christ qui vient à elle et qui se donne à elle comme Fils. Ou encore, ce n’est pas la mère qui donne naissance au fils, mais le Fils qui donne naissance à la Mère et la révèle à elle-même. Marie est mère parce qu’elle se reçoit de son fils ; Marie est Mère de Dieu pour nous les hommes, parce qu’elle consent à se recevoir totalement de Dieu, à être, à naître que selon ce que Dieu veut. Et c’est là ce qu’elle nous invite à vivre. Vivre de la Paternité de Dieu, de Dieu comme unique et première source, origine. La maternité de Marie, parce que comme toute maternité est fécondité, souligne l’accueil d’une source qui vient d’ailleurs qu’elle-même, marque sa dépendance de la Paternité de Dieu pour donner la vie. Il y a dans cette maternité un renoncement à soi et une entrée dans la foi. Et pour que Marie soit vraiment Mère, Mère de Dieu, il lui faudra vivre dans la foi. Car elle sait, elle pressent, qu’elle ne peut aimer cet enfant uniquement de l’amour naturel d’une mère. Il lui faut aussi cet amour pour son Dieu, son dessein ; une grâce particulière que là encore nous pouvons méditer dans notre cœur. Si toute mère est liée à son enfant, si elle porte toutes ses joies et toutes ses peines, comment la Mère de Dieu a-t-elle été liée à son fils ? Combien s’est-elle attachée à lui, à sa vie, son destin ? Marie, par sa maternité, a été totalement embarquée par le projet de Dieu, a été totalement attachée à son fils, a été elle aussi broyée comme l’indique déjà la mention de la mangeoire et comme le dira sa présence au pied de la Croix. Être Mère de Dieu c’est se retrouver au cœur, au cœur transpercé, de l’œuvre du salut. Et c’est à cet embarquement qu’elle nous invite, c’est à lier totalement notre vie à celle du Christ ; à lier notre sort au sien même s’il nous faut aller, passer de l’ombre de la mort à l’ombre de la Croix. Consentir à dépendre de Lui parce qu’il frappe à notre porte. Parce qu’une nouvelle fois, il veut dépendre de nous et attend que nous lui donnions naissance en nous, dans notre monde, et qu’il puisse alors nous relever et nous révéler qui nous sommes. Ainsi, frères et sœurs, célébrer la Mère de Dieu, c’est vouloir, par son intermédiaire, nous rapprocher un peu plus du Christ, le suivre un peu mieux dans le concret de notre vie. C’est choisir la fécondité en recevant de Dieu la source de toute vie, de toute naissance. Alors, en cette eucharistie, illuminés encore par la joie de Noël, approchons-nous de l’autel, de la mangeoire, afin qu’il en soit ainsi.