Pentecôte - (Jn 15,26-27 ; 16,12-15) - Mai 2018

 « Quand il viendra, lui, l’Esprit de vérité, il vous conduira dans la vérité tout entière » (13). Frères et sœurs, en cette fête de la Pentecôte, nous célébrons cette venue de l’Esprit. Oui, l’Esprit est venu, l’Esprit vient, et il nous conduit, chacun et tous ensemble, dans la vérité tout entière. Et cette vérité, c’est le Christ. L’Esprit nous conduit vers le Christ, dans le Christ, dans la vie avec le Christ. Car comme on ne peut séparer le Père et le Fils, on ne peut séparer le Fils et l’Esprit : c’est par l’Esprit que le Fils agit ; c’est dans le Christ que l’Esprit agit.

 

Le Christ, c’est le Verbe, la Parole faite chair ; « il est venu chez lui - comme nous le dit saint Jean dans le prologue de l’évangile - mais les siens ne l’ont pas reçu » (1,11). La Parole s’est faite révélation, mais elle n’a pas pu pénétrer là où l’Esprit n’a pas été accueilli. En sens inverse, et nous l’avons entendu dans la première et la deuxième lecture, là où l’Esprit a été accueilli, la Parole, la Révélation a été transformation. Transformation des apôtres qui sortent à la rencontre des habitants de Jérusalem, ne pouvant plus garder pour eux seuls le trésor, l’avenir, la vie qui leur ai donné ; transformation des chrétiens qui, comme saint Paul le souhaite pour les Galates, marchent sous la conduite de l’Esprit en cultivant en eux et autour d’eux l’amour, la joie, la paix, la patience, la bonté, la bienveillance, la fidélité, la douceur et la maîtrise de soi. Il est intéressant de nous demander où nous en sommes – personnellement et communautairement - avec chacun des fruits de l’Esprit Saint.

Le Christ, manifestation de la miséricorde et de la fidélité du Père pour nous, a tout autant, par ses paroles et par ses actes, manifesté l’Esprit, mais il n’a pu le montrer distinct de lui. Son retour au Père dans la gloire, que nous avons célébré à l’Ascension, donne à ses disciples de discerner cet Esprit qui l’animait, parce qu’en ce jour de la Pentecôte, il le leur donne, et ils découvrent, émerveillés, qu’animés par le même Esprit, ils sont appelés à accomplir les mêmes œuvres que le maître. Il suffit ici de relire les Actes des Apôtres, pour voir ces disciples, comme Jésus, parcourir les routes pour annoncer la Bonne nouvelle, guérir les malades, être persécutés à leur tour.

Dans l’Esprit, les apôtres sont enfin véritablement unis au Christ : Ils comprennent désormais toute la portée de ses paroles et de ses actes ; ils peuvent confesser sans hésitation que Jésus, Christ ressuscité est Seigneur ; ils entrent dans sa prière en disant à Dieu : « Abba, Père » ; et, comme nous allons le faire, ils rompent et partagent le pain au nom de Jésus pour vivre et revivre son action de grâce. Ainsi, la vie dans l’Esprit qui leur est donnée, est expérience d’une présence, d’une présence aimante et fidèle, d’une présence vivante et vivifiante.

 

Aujourd’hui encore, comme il le faisait au bord du lac de Tibériade, à Jérusalem ou sur la route de Damas, l’Esprit souffle, se rend présent, appelle et rassemble des hommes et des femmes en un seul corps, en Eglise, pour vivre en enfants de Dieu. Et ce que l’Esprit a été pour Jésus, ce qu’il a été pour les premiers chrétiens, il l’est encore pour nous. Aujourd’hui encore, donc, il nous attire au Christ, il nous le manifeste, nous ouvre à sa Parole et à son Eucharistie, et nous met en communion avec Dieu et avec les hommes pour que nous portions du fruit. Alors, comme le dit saint Paul dans la deuxième lecture : « Puisque l’Esprit nous fait vivre, marchons sous la conduite de l’Esprit » (Ga 5,25). Et cette marche sous la conduite de l’Esprit, saint Paul, comme pour nous la décrire, l’oppose tout simplement à ce qu’il appelle « les convoitises de la chair », ce que l’ancienne traduction liturgique nommait « les tendances égoïstes de la chair ». L’Esprit, qui nous attire à Dieu, qui nous envoie vers les autres, qui nous rassemble en un seul corps, est celui qui nous ouvre, qui nous sort de nous-mêmes, qui nous déplace. Et ce mouvement incessant qu’il entretient dans nos vies et dans notre monde, se joue certes sur les routes et sur les places, mais il se joue surtout en nous-mêmes, dans notre cœur. Nous sommes invités à écouter l’Esprit au fond de nous-mêmes, nous qui en sommes le temple, pour entrer dans ce mouvement, dans cette croissance de la vie, et éviter ainsi de nous fermer, de nous éteindre sur nos certitudes, nos sépulcres blanchis.

Frères et sœurs, aujourd’hui s’achève le temps pascal, temps qui redit la source de notre foi : le Christ est ressuscité ! Aujourd’hui aussi, le vent de la Pentecôte souffle sur nous pour nous plonger, nous entraîner à la suite du Christ, à la suite de son amour pour le Père et pour les hommes. Aujourd’hui encore les langues de feu sont posées sur chacun d’entre nous pour dire à ceux qui nous entourent qu’un feu nous habite, un feu qui couve et qui ne demande qu’à surgir, parce qu’il est la vie, vie offerte et promise à tout homme.