16 juin 2023 - Solennité du Sacré-Coeur

Deut 7,6-11; 1Jean 4,7-16; Mt 11,25-30

H O M É L I E

          L'aspect du mystère du salut que nous célébrons aujourd'hui n'est pas tellement différent de celui que nous avons célébré il y a une dizaine de jours, le dimanche de la Trinité.  "Dieu est amour", répète saint Jean, comme un refrain, dans la seconde lecture de la messe d'aujourd'hui.  Ces trois mots résument tout le mystère de l'union du Père à son Fils dans leur commun Esprit.  Ils résument aussi tout le mystère des relations entre Dieu et l'humanité.

          Déjà dans l'Ancien Testament, le peuple hébreu s'était perçu comme particulièrement aimé de Dieu et il était resté fasciné par la gratuité de cet amour d'abord, et ensuite par la fidélité de Dieu à cet amour malgré toutes les infidélités de son peuple.

          Saint Jean est fasciné par le fait que Dieu nous a aimés le premier et qu'il nous a manifesté son amour en nous envoyant son Fils unique afin que par lui nous ayons la vie en plénitude.  Mais cela ne lui suffit pas.  Il en dégage aussi les conséquences pour notre vie de tous les jours, en utilisant une logique très simple et sans faille: puisque Dieu nous a aimés, nous devons non seulement l'aimer en retour, mais aussi nous aimer les uns les autres.  Et, toujours dans la même logique il continue: puisque Dieu est amour, celui qui demeure dans l'amour, c'est-à-dire, celui qui persiste dans l'amour, qui réside dans l'amour, qui est fidèle comme Dieu lui-même est fidèle, cette personne-là demeure en Dieu et Dieu demeure en elle.  Cette personne-là est introduite par l'amour dans le mystère même de la vie trinitaire.

          Quiconque aime vraiment sait que l'amour est exigeant.  Le Livre du Deutéronome énonce par la bouche de Moïse l'importance de garder les ordres, les commandements et les décrets prescrits par Dieu ou au nom de Dieu, parce que cette obéissance est perçue comme une expression d'amour et de fidélité.  Jésus, dans l'Évangile, n'est pas moins exigeant.  C'est à ceux qui veulent marcher à sa suite, c'est-à-dire devenir ses disciples et vivre selon son enseignement, qu'il révèle les secrets du Père restés cachés aux sages et aux savants.  Lui-même se présente comme doux et humble de coeur.

          Le coeur est conçu dans toutes les cultures comme le lieu où réside les sentiments, l'affectivité, l'amour. C'est pourquoi, à partir déjà du Moyen-Âge, des mystiques tels que Gertrude, Catherine de Sienne, Mathilde, Marguerite Alacoque, Jean-Eudes, développent une dévotion au Coeur Sacré de Jésus, qui n'est pas une dévotion à un organe physique, mais à l'amour divin vécu par Dieu fait homme.  Si cette dévotion a pu connaître à certaines époques des expressions plutôt romantiques et sentimentales, comme en fait foi une vaste collections d'images pieuses au goût plutôt douteux, elle n'est essentiellement, dans son intuition première, que la contemplation de l'amour de Dieu pour nous, incarné en Jésus de Nazareth.

          Puisqu'il nous a tant aimés, aimons-nous donc les uns les autres du même amour exigeant, prêts à aller jusqu'au don de nous-mêmes et au don de notre vie.